25ème dimanche du temps ordinaire
Abbé Jean Compazieu | 10 septembre 2022
« Qui est semblable au Seigneur notre Dieu ? »
Homélie
Textes bibliques : Lire
Aujourd’hui, Jésus nous invite à réfléchir sérieusement sur deux styles de vie qui sont opposés : le style mondain et le style de l’Évangile, l’esprit du monde et l’esprit de Jésus. Pour nous aider à mieux comprendre son message, Jésus nous raconte la parabole du gérant infidèle et corrompu : ce dernier va être licencié pour faute grave ; désormais, il va se retrouver à la rue, les poches vides. Il réfléchit très vite à la meilleure solution. Il pense s’attirer la bienveillance des débiteurs de son maître en abaissant leur dette. C’est de cette manière qu’il choisit d’assurer son avenir.
Il est bien sûr hors de question d’approuver cette fourberie. Ce qui est mis en valeur, c’est l’habileté des “fils de ce monde”. Quand il s’agit de leurs intérêts personnels, ils savent trouver des solutions. Le Christ voudrait bien que les “fils de lumière” soient aussi habiles pour que l’argent serve à tous. Le pape François nous invite “à répondre à cette ruse mondaine par la ruse chrétienne, qui est un don de l’Esprit Saint”. Il s’agit de s’éloigner des valeurs du monde pour vivre selon l’Évangile.
À travers cet enseignement, le Christ nous appelle à choisir entre l’esprit du monde et lui, entre la logique de la corruption et de l’avidité et celle de la rectitude, de la douceur et du partage”. “Faites-vous des amis avec le malhonnête argent, afin que le jour où il ne sera plus là, ces amis vous reçoivent dans les demeures éternelles”. Sainte Teresa de Calcutta avait bien compris ce message : Ces amis, ce sont les plus pauvres parmi les pauvres, les miséreux, les exclus. À travers eux, c’est Jésus qui est là. Chaque fois que nous nous mettons à leur service, c’est lui que nous servons. La principale amitié qu’il nous faut chercher c’est celle de Dieu. Il est notre richesse suprême qui nous permettra d’être accueillis “dans les demeures éternelles”.
la première lecture nous adresse une proclamation percutante du prophète Amos. Il s’attaque durement aux désordres, aux inégalités et à l’exploitation des pauvres. Lui qui était éleveur de bétail s’y connaissait en ce qui concerne l’enrichissement des riches au détriment des pauvres. Il dénonce la tromperie sur les marchandises. Quand on profite de la dépendance des plus faibles pour les exploiter encore plus, ce n’est pas tolérable. Ce n’est pas pour en arriver là que Dieu a fait alliance avec son peuple. À travers les opprimés et les exploités, c’est lui-même qui est frappé.
Amos n’est plus là mais son message est plus que jamais d’actualité : il faut savoir que plus de la moitié du patrimoine mondial est détenue par un pour cent de la population. Et que dire des magouilles en tous genres, des tromperies sur la marchandise, des arnaques sur Internet ? Si Amos était là, il dénoncerait l’esclavage actuel : Des hommes, des femmes et même des enfants travaillent de longues heures pour gagner à peine de quoi manger. Quand nous achetons les produits ainsi fabriqués, nous participons à cette injustice. Il est urgent que nous entendions l’appel d’Amos à la construction d’un monde plus juste et plus fraternel.
Dans la seconde lecture, nous avons le témoignage de saint Paul. L’âpreté au gain, ce n’est vraiment pas son problème. Bien au contraire, il s’est mis au service de la foi et de la vérité. Il annonce un Dieu qui veut le salut de tous les hommes. Jésus est mort pour tous, y compris pour ceux qui exercent des responsabilités politiques. Paul demande que l’on prie pour tous les hommes et plus spécialement pour les responsables de notre société : que ces derniers facilitent le climat de paix et de dignité dont notre monde a bien besoin. La vraie prière c’est de parler à Dieu de son projet, c’est entrer dans son projet et nous en imprégner. Avec lui, nous deviendrons capables de répandre la bonne nouvelle comme une traînée de poudre. Le moment le plus important c’est la messe du dimanche. On peut la comparer à une vaste réunion de chantier. Ce chantier, c’est celui du Royaume de Dieu. Si nous voulons être fidèles au Maître d’œuvre, notre présence est indispensable.
Dans quelques jours, nous entrerons dans le mois du Rosaire : en communion avec tous les pèlerins de Lourdes et d’ailleurs, nous demandons à la Vierge Marie de nous aider à choisir le chemin juste. C’est avec elle que nous trouverons le courage d’aller à contre-courant pour suivre Jésus et son Évangile.
Télécharger : 25ème dimanche du Temps ordinaire
Commentaires et prière universelle : Lire
Sources : Revue Feu Nouveau et Fiches dominicales – François selon saint Luc – L’intelligence des Écritures (Marie Noëlle Thabut – Assemblées du dimanche – L’Évangile de la Miséricorde (Cardinal Schönborn).
« Un homme riche avait un gérant qui lui fut dénoncé comme dilapidant ses biens. » (Lc 16:1) Parmi toutes les paraboles des Évangiles, celle du ‘gérant malhonnête’ est certainement l’une des plus difficiles à interpréter, voire à admettre car elle souligne l’éloge du maître de la maison à son ancien intendant en apprenant que ce dernier, sur le point d’être congédié, arrive encore à l’escroquer : « le maître fit l’éloge de ce gérant malhonnête car il avait agi avec habileté… » (Lc 16:8) Cette parabole nous met mal à l’aise, parce qu’elle semble nous donner comme modèle un vrai escroc !… Mais, en réalité, Jésus ne met pas en avance l’immoralité de cet intendant, mais son inventivité. Par la leçon du récit, Jésus veut appeler ses disciples à être aussi intelligents que ce gérant malhonnête. Il ne le loue pas pour sa friponnerie, mais souligne son habileté à s’en sortir rapidement d’une position inconfortable.
D’ailleurs, Jésus fait bien la distinction entre celui qui se montre habile dans les affaires et une personne travaillant pour le bien de tous. Il exprime toutefois tristement un regret : « En effet, les fils de ce monde sont plus habiles entre eux que les fils de la lumière. » (Lc 16:8) ‘Les fils de la lumière’ se montrent parfois bien timorés lorsqu’il s’agit de se démener pour des causes en faveur de la foi. Face aux magouilleurs sans conscience, Jésus nous invite à mettre toute notre ingéniosité pour faire régner les belles valeurs de l’Évangile. Il nous exhorte à être assez imaginatifs mais toujours sans reproche pour faire avancer l’œuvre de Dieu. « Je vous envoie comme des brebis au milieu des loups. Soyez donc prudents comme les serpents, et candides comme les colombes. » (Mt 10:16) Si dans les affaires du monde, on se montre habile pour se sortir de situations difficiles, les chrétiens devraient aussi se révéler capables d’initiative pour réaliser les projets à la gloire de Dieu !
En écoutant la parabole, nous avons l’impression de retrouver l’actualité des faits divers ! En effet, la remarquable clairvoyance du filou dans l’Évangile nous fait penser aux dextérités de certains à manipuler le système social pour détourner l’argent à leur profit. Les fausses factures, les délits d’initiés, les abus de biens sociaux et autres… font souvent les gros titres dans les médias. Tout cela était déjà dénoncé en son temps par le prophète Amos. Il avait des propos sévères contre les riches qui achètent « le faible pour un peu d’argent, le malheureux pour une paire de sandales. » (Amos 8:6) Ceux-là profitent de l’ignorance et de la vulnérabilité de leur victime pour en tirer le meilleur profit. À travers la parabole du ‘gérant malhonnête’, Jésus dépeint les manœuvres frauduleuses d’un escroc mais ne nous incite pas à l’imiter. Au milieu des gens sans scrupule, Jésus nous demande à mettre en avant notre savoir-faire au service de Dieu, à être ingénieux pour venir en aide aux plus défavorisés.
L’argent mal acquis corrompt les mœurs et rend l’homme esclave. Hélas, il occupe, aujourd’hui comme hier, souvent la première place dans notre société aux dépens de l’intérêt des plus faibles. Les belles valeurs ne sont, dans ces circonstances, qu’une chimère. Il y a toujours des roublards qui savent profiter du système pour s’enrichir sur le dos des plus vulnérables. Quand l’argent règne en maître, il nous éloigne de Dieu ! Jésus nous prévient : « Aucun domestique ne peut servir deux maîtres : ou bien il haïra l’un et aimera l’autre, ou bien il s’attachera à l’un et méprisera l’autre. Vous ne pouvez pas servir à la fois Dieu et l’argent. » (Lc 16:13) Jésus nous invite à changer notre conduite vis-à-vis d’un bien matériel qui peut nous rendre esclave. Le Seigneur nous l’a confié en gestion et nous demande d’être un administrateur avisé. Nous en avons besoin pour mettre à l’abri les personnes sous notre responsabilité, mais nous avons aussi un devoir de partage. Quelle que soit notre situation, nous pouvons toujours venir en aide aux plus démunis. Une bonne gestion de nos ressources ouvre généreusement notre cœur et élargit nos relations : « Faites-vous des amis avec l’argent malhonnête, afin que, le jour où il ne sera plus là, ces amis vous accueillent dans les demeures éternelles. » (Lc 16:9) L’argent utilisé à bon escient nous procure la paix intérieure.
Soyons donc prêts à nous investir avec habileté en temps et en argent pour nous occuper des bonnes causes et pour répandre les belles valeurs de l’Évangile autour de nous. Soyons aussi ingénieux que le gérant malhonnête pour prévoir notre entrée dans l’éternité. Mais ne laissons pas les préoccupations matérielles occuper constamment notre esprit car elles divisent notre cœur. « Là où est votre trésor, là aussi sera votre cœur. » (Luc 12:34)
Nguyễn Thế Cường Jacques